Le tourisme durable peut-il contribuer à préserver le patrimoine ?

vendredi 9 juin 2017 Actus du réseau France
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Twitter Chat #TDTC "Tourisme Durable et Patrimoine"

Le 6 juin le twitterchat tourisme durable #TDTC avait pour thème le Patrimoine. Pour cette occasion, nous avons invité Camille Guyon du Réseau Grands Sites de France à venir débattre sur cinq questions. Avec cette interrogation en toile de fond : en quoi le tourisme durable peut-il contribuer à préserver le patrimoine ?

 
De quelle manière le patrimoine peut-il être un enjeu du développement durable ?

Le patrimoine est une matière première essentielle des destinations touristiques, il est nécessaire de la préserver et de la valoriser. C’est un enjeu fort du tourisme durable [ID Tourisme]. Le patrimoine est une notion large, il peut être naturel, culturel, bâti, et les Grands Sites de France rassemblent toutes ces composantes. Il appelle une gestion durable et transversale qui permette de trouver un équilibre entre site, habitants, et visiteurs. A cette fin, il faut prendre en compte toutes les dimensions de son espace naturel, habité, agricole, et historique comme aux « Deux-Caps Blanc-Nez, Gris-Nez ». Un patrimoine préservé est la base d’une expérience visiteur réussie, et se révèle un atout concurrentiel [Réseau des Grands Sites de France]. Pour aider à la réussite de cette expérience, le camping de la Fontaine du Hallate collabore avec le PNR du Golfe du Morbihan et le Grand site de Gavre-Quiberon, pour faire découvrir le patrimoine régional dans le respect de l’environnement. Cette découverte peut se révéler aussi un bon moyen de sensibiliser la population environnante en cette matière [Camping Morbihan]. Il est donc primordial pour les territoires de préserver leur patrimoine car il représente une composante essentielle de leur richesse et de leur attractivité [World Me Now].

 

En quoi le tourisme durable peut-il contribuer à la préservation du patrimoine ?

Le touriste est un acteur important de la protection des sites et de la vie locale, il finance directement ou indirectement les chantiers de restauration du patrimoine, et bénéficie à l’économie locale. Le tourisme durable participe à la vitalité et à la protection des territoires [Grands sites de France]. Opter pour un tourisme qualitatif plutôt que quantitatif permet de préserver le patrimoine et d’avoir une meilleure expérience de voyage [World Me Now]. Le tourisme durable sensibilise également les locaux en créant un lien sentimental avec les sites patrimoniaux. On se souvient de la mobilisation des habitants en 1999 après la tempête dans les jardins de Versailles, et l’élan de solidarité financière qui a suivi pour replanter des arbres [PariSolidari-Thé]. Pour aider à préserver le patrimoine, il est essentiel de gérer les flux touristiques, cela permet aussi de mieux orienter et conseiller les visiteurs [PariSolidari-Thé] [Camping Morbihan]. Pour ce faire les gestionnaires des Grands Sites cherchent à diffuser la fréquentation dans la durée, les saisons et l'espace afin d'offrir une expérience agréable et harmonieuse pour les visiteurs et des retombées qui profitent à un territoire élargi. Ainsi quand un visiteur est accueilli on ne le renseigne pas seulement sur le site, mais aussi sur les activités proposées sur le territoire [Grands sites de France]. Une gestion durable des flux touristiques sur un site naturel passe aussi par l’orientation des visiteurs vers les zones accessibles à la visite, et l’interdiction d’accès à des zones protégées (comme à la Pointe du raz, ou certains sites dunaires), afin d’aider à la repousse de la végétation, ou ne pas déranger la reproduction des oiseaux migrateurs (Réserve Naturelle du Banc d’Arguin) [Olivier Ranson].

 

Selon vous, quelles sont les bonnes pratiques touristiques à observer sur un site naturel du patrimoine ?

Tout d’abord, il faut aménager le site dans le respect de l’esprit du lieu, ne pas le dénaturer, afin de créer les conditions de « l’émotion paysagère ». Il faut reculer les parkings, créer des parcours à pieds avec différentes ambiances, doser les équipements au strict nécessaire, en bref tendre vers la simplicité et la sobriété. Dans cet esprit, Grands Sites de France a publié un recueil de bonnes pratiques du tourisme durable s’adressant à tous les acteurs du secteur, basé sur 20 exemples innovants dans les sites du réseau [Grands sites de France]. Ainsi, il faut informer les visiteurs des bonnes pratiques en fonction du site, afin de les sensibiliser aux bons comportements et au respect des lieux [World Me Now].

Les sites patrimoniaux ont aussi le devoir d’accueillir et transmettre des valeurs propres qui font sens en proposant des offres non standardisées. En invitant notamment le public à explorer les richesses environnantes, à le sensibiliser au respect des lieux, au tourisme durable et à l’éco-responsabilité [Grand Stes de France]. Pour le Camping du Hallatte qui a une approche durable, il est valorisant de pouvoir partager ces valeurs avec les sites. Par une meilleure connaissance du local, on peut arriver à créer une expérience exceptionnelle et un étonnement naturel au quotidien. L’observation des bonnes pratiques sont génératrices d’un tourisme plus responsable et éthique qui contribue également à l’amélioration de la vie des populations locales [Pandora Travel].

Pour Grands Sites de France, il est nécessaire de travailler avec des professionnels du tourisme, de les mettre en réseau, de les former et de les informer sur les pratiques durables. En ce sens, des rencontres sont organisées régulièrement sur les sites du réseau, et on peut constater qu’elles ont un impact positif sur la protection de l’environnement [Grands sites de France] [Camping Morbihan].

 

Connaissez-vous des exemples de mise en tourisme qui ont pu sauver un patrimoine en danger ? Comment ?

D’une manière générale, et à l’heure du désengagement financier de l’Etat dans le domaine de la culture, la préservation du patrimoine passe de plus en plus par les financements privés, et notamment par la mise en tourisme des sites patrimoniaux. Il existe beaucoup de petits patrimoines locaux qui n’ont pu être sauvés que par le biais du tourisme. C’est aussi vrai pour le patrimoine immatériel comme des savoir-faire artisanaux qui n’ont pu survivre et se transmettre que grâce à l’achat des visiteurs [Olivier Ranson].

Favoriser la découverte des sites sans voitures a pu dans certains cas les rendre à la nature, en reculant et en re-naturant les parkings, mais aussi en responsabilisant les campings-caristes. Cette pratique a permis à plusieurs sites de se régénérer et de sortir de l’asphyxie d’un trop plein touristique. Une liste de ces sites étiquetés « Escapade Nature sans voiture » est d’ailleurs consultable sur le site du réseau [Grands Sites de France].  

Certaines agences comme Double Sens organisent des voyages solidaires autour de la protection du patrimoine comme au Bénin et Cap Vert. En participant à ces voyages les touristes contribuent au financement des restaurations, et peuvent même y travailler [Double Sens]. L’UNESCO suggère même le tourisme comme stratégie de revitalisation du patrimoine dans le cas des terrasses rizicoles aux Philippines [PariSolidari-Thé]. A ce titre l’organisme a créé une boîte à outils sur le tourisme durable dans les sites du patrimoine mondial [Olivier Ranson].

Sur le site de la Montagne Sainte Victoire, l’ouverture aux manifestations sportives s’est traduit par une charte établie avec des pros du tourisme, ayant pour objectif de réduire l’impact écologique. Cette charge engage les signataires à œuvrer à la conservation du site, à la préservation de son caractère sauvage, à la diffusion de l’information sur la fragilité du milieu naturel, et à la promotion des comportements éco-citoyens [Grands Sites de France].

 

Selon vous, quels sont les enjeux du patrimoine de demain ?

Demain, un des enjeux du patrimoine passera par la lutte contre la gentrification de certains quartiers de grandes villes, le respect des cultures, et l’organisation de rencontres entre les habitants pour éviter les conflits. Mais aussi l’accueil des visiteurs de manière plus qualitative en préservant l’esprit des lieux [PariSolidari-Thé].

Pour Grand Sites de France, il s’agira de diffuser la fréquentation au-delà des « hot spots » touristiques du patrimoine. Et de permettre plus de transversalité entre patrimoines naturels et culturels. Dans cette optique, des gestionnaires de sites se sont réunis pour la première fois en 2016 pour un forum s’intitulant « Patrimoines naturels et culturels, enjeux et synergies ». Les sites du patrimoine ont également des défis communs à relever, et cela passe par un développement de la coopération internationale des gestionnaires de sites, notamment dans le partage des bonnes pratiques sur la gestion et la préservation du patrimoine [Grands sites de France].

Aujourd’hui comme demain, l’enjeu numéro 1 du patrimoine reste la transmission de ce bien commun aux générations qui nous succèderont. Il est donc nécessaire de rester vigilant et de lutter contre les tentatives de destructions opérés dans certaines régions du monde pour des raisons politiques ou religieuses [Olivier Ranson].

 

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